Body positiv

On en a Gros

– Être gros –

Parce qu’on est hors normes, comment peut-on passer le quart, le tiers, voire la moitié de sa vie à penser qu’on ne vaut qu’un demi être humain, et pourquoi sommes nous si doués pour s’en persuader les uns les autres ?

Hein ? Pourquoi ?

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Lisez sur mes lèvres : « POURQUOI ? »
Moi tout jeune ours blond d’une quinzaine de printemps, c’était mal barré pour aller trainer avec la bande des guépards. La mode était plutôt aux body musclés et élancés façon 2 be 3, et aux curieuses coutumes vestimentaire (Nike Air + Sergio Tachinni + Chaussettes ? Ça y est, vous vous rappelez ?).

Les jeunes années des rejetons occidentaux se déroulent toutes au sein d’un même territoire d’où s’orchestre la programmation des personnalités de tout un chacun : la jungle scolaire et son théâtre de violences sociales. En d’autres termes, la sélection naturelle des sociétés civilisées.

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Bienvenue à l’école ma grande ! Oups, je pensais que c’était la craie…. déso.
Je ne vais pas me risquer à faire ici la diatribe du système scolaire et des ses conséquences sur la construction de l’individu, d’une part ce n’est pas le sujet, et d’autre part j’en fais encore parti. Toutefois, il me paraît nécessaire de l’évoquer pour comprendre par quoi nous passons, nous les trop gros, les trop maigres, les trop moches, les trop homos, les trop autistes… finalement les trop différents, pour arriver à se forger l’individualité nécessaire pour la plus élémentaire des raisons : exister.

Exister physiquement et socialement, avec la dignité, les égards et les droits qui incombent à tout être vivant.
A l’heure où toutes ces notions semblent se faire doucement balayer au profit de concepts qui échappent aux réalités de l’humain, je pense que ce n’est pas un mal que de rappeler ce genre d’évidence. N’en déplaise aux « réalistes ».

Mais en attendant, quoi ?

 

En attendant, on observe, on se questionne, on pense et on agit.

 

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Première étape pour toute révolution.
Beth Ditto, c’est un peu la papesse de la body positivity*1, avant même que ce néologisme ne devienne un argument marketing mainstream.
Très tôt, elle a compris la manière dont une société marchande contrôle nos désirs par nos frustrations, et utilise le concept du corps acceptable pour nous formater à son modèle. Dès lors, il lui a fallu faire un choix. Se confondre à ce que la société attendait d’elle, ou s’accepter tel qu’elle était. La suite, vous la connaissez sûrement.

Son parcours révèle à mon sens un passage important, celui de la déconstruction.
Cette attitude qui consiste à analyser les structures institutionnelles et sociales, décomposer leurs mécaniques (dans notre cas, les schémas oppressifs de l’apparence, ce qu’on appel habituellement les diktats de la beauté/minceur), afin de découvrir et d’extraire les relations de dominations sous-jacentes à ces structures.*2

Comment s’est construit ce système ? Par qui ? Afin d’avantager qui ? Etant donné le contexte actuel, ce système est-il toujours valide ?

Se poser ces questions quand on se sent hors normes, c’est le commencement d’un processus de compréhension du monde qui nous entoure, puis d’une démarche consciente de réappropriation de nous même en regard de ce monde dont on découvre peu à peu de nouvelles facettes. Cela peut s’avérer être un travail long, parfois pénible, mais éminemment libérateur.

Derrière chaque mouvement social, il y a cette déconstruction et cette envie viscérale d’exister dans un monde qui vous refuse.
Ainsi, féminisme, mouvement queer, size/fat acceptance, antiracisme, LGBT et tout les mouvements que j’oublie ou que je ne connais pas encore, sont intimement liés, mûs par ce désir de rendre justice à ceux qui sont lésés.

Mais vient un temps où les théories et les réflexions ne suffisent plus. Il faut agir.

 

Et il n’y a pas de meilleur façon d’agir que de le faire selon vos convictions et le medium que vous vous choisirez.

Je lis parfois au détour d’internet que les blogs mode grandes tailles ne sont pas militants pour la simple raison que leurs auteurs ne s’expriment pas clairement sur le sujet. Pourtant, un bref aperçu de la définition du mot expression nous apprend qu’il n’y a pas qu’une façon de s’exprimer sur un sujet ; qu’un geste, une attitude, un regard, sont autant de moyens de traduire un sentiment, et à fortiori des convictions. A mon sens, il est parfois plus pertinent de laisser parler les images et les sons, que de les commentés.
Si le credo de la body-positivity est que tous les corps se valent (all bodies are good bodies), pourquoi une action serait plus valable qu’une autre ?

Alors, allez-y composez des chansons, faites des tutos make up, écrivez des livres, faites de l’art, rédigez des pamphlets, jouez une pièce théâtre, tenez un blog, ou un journal intime, exprimez vous. Si vous le faites par conviction, vous êtes dans le bon.

 

j'ai choisi
Et vous saurez bientôt pourquoi !

Cet article est le premier d’une – je l’espère – longue liste d’autres articles qui viendront approfondir ces notions de body positivity, des enjeux qui en découle et qui gravitent autour, de l’histoire qui l’accompagne, etc… En espérant pouvoir apporter le plus modestement possible ma pierre à l’édifice.


 

Notes :

*1 Beth est, à mon sens, une icône générationelle de la body positivity, celle avec laquelle j’ai eu cette prise de conscience qui m’a fait débuté ce travail de déconstruction des schémas et d’acceptation. J’ai bien conscience qu’il y en a eu d’autres avant elle, je pense notamment à Anne Zamberlan qui a beaucoup oeuvré en France avec son association Allegro Fortissimo. Son engagement et son parcours atypique mérite d’être évoqué.

*2 L’analyse et la déconstruction plus approfondie des schémas et structures dans le cadre du corps gros se fera dans un article à part, car cela mérite d’être étudié plus spécifiquement.

Sources :

What would Beth Ditto do ?

Why Beth Ditto is my ultimate body positive icon

What is Body Positivity Movement ?

5 réflexions au sujet de « On en a Gros »

  1. J’ai beaucoup aimé cet article. C’est vrai que l’école en particulier le college est un passage difficile à traverser. Je trouve que justement c’est le moment où l’acceptation est quasi impossible parce qu’ ado lambda a parfois du mal à s’accepter alors un ado différent entouré de regards malveillants ou insulté…
    Pour revenir aux blogs plus size, je les trouve importants, pouvoir régulièrement regarder des « corps comme le mien » alors que je n’en voyais nulle part et les voir porter des vêtements que je n’aurai jamais osé porter ou meme pensé porter m’a beaucoup aidé à de multiples niveaux.

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